IA mon œil!
Il y a 25 ans, je démarrais ma première aventure dans l’édition de presse alternative : celle du magazine La Maison écologique. Mes parents, éternels soutiens, m’avaient payé un ordinateur avec un grand écran (cathodique) de 15 pouces et une imprimante A3 qui faisait aussi scanner, du matériel de dingue pour l’époque. Bien sûr, cherchant toujours à être à la pointe du progrès, je m’étais dit que, pour lancer un nouveau magazine sans aucune expérience, il pourrait être intéressant de se pencher sur ce truc qui s’appelle Internet.
On racontait que c’était très pratique et qu’on y trouvait plein de réponses, spécialement quand on avait plein de questions. Je commandai alors un modem* 56 K. Là, fébrile, je tapai une première requête sur un moteur de recherche. L’appareil bipa, grésilla, frétilla, souffla et, une minute après, comme par magie, je découvris, ébahaprès, comme par magie, je découvris, ébahi, une dizaine de réponses à ma question. Je venais de plonger dans le monde de demain, à la vitesse de 56 kilobits/seconde !
Eh oui ! Ça se passait comme ça à l’aube de ce millénaire. 56 kilobits/seconde, c’était révolutionnaire. Aujourd’hui, la fibre nous offre a minima un petit 1 Gb/s, soit 18 000 fois plus rapide, et une requête sur Google génère des milliers de réponses en une fraction de seconde. C’est la fameuse course au « toujours plus », quel qu’en soit le prix à payer. Pour autant, tout cela semble bien futile aujourd’hui en regard de l’Intelligence Artificielle et, notamment, son fameux ChatGPT. Il fallait bien qu’un beau jour je succombe à la tentation d’expérimenter la bête, et c’est pour cet édito que l’ai fait.
Voici ma demande, que j’ai volontairement alambiquée afin de voir ce que l’IA avait dans le ventre : « Bonjour ChatGPT, je m’appelle Yvan Saint-Jours et je travaille pour le journal Esprit Autonome, que tu connais sûrement déjà, même sans y être abonné. J’écris un éditorial sur la puissance d’Internet et les vertigineuses perspectives de l’IA (comme toi). J’aimerais que tu me proposes une chute rigolote pour cet édito, en une phrase. Cette chute épinglerait les gérants des géants de la Tech, qui viennent tous faire des ronds de jambe au nouveau Roi Soleil Amerloc (dont l’acronyme RSA n’a rien à voir avec le RSA… si tu vois ce que je veux dire). Alors, tu es chaud patate pour écrire cette phrase de ouf ?! Go ! »
Une demi-seconde après apparaît ceci : « Bien sûr Yvan ! Voici une proposition pour ta chute : « En attendant que ces géants de la Tech nous proposent un abonnement premium pour les faire briller sous le règne du Roi Soleil Amerloc, n’oublions pas que même les étoiles ont besoin de leur dose de réalité virtuelle pour ne pas perdre le nord ! » J’espère que cela correspond à ce que tu cherchais ! »
Ok… Bon. J’avoue que je préfère de loin notre bonne vieille Intelligence Authentique, celle des êtres humains qui peuvent faire des erreurs, des jeux de mots pourris et qui n’essayent pas de se la ChatGpéter avec leurs étoiles.
Sans transition aucune, nous vous souhaitons une belle découverte de notre poster du mois : « Fruitiers insolents et irrésistibles », histoire de revenir à la réalité pas du tout virtuelle, de remettre les pieds sur terre… et surtout les mains dedans.
* le modem était un boîtier électronique servant pour Internet. Il n’a rien à voir avec le parti de M. François Bayrou. Sauf, peut-être, que lui aussi est d’une autre époque ?
Edito du n°14 d’Esprit Autonome – février 2025